Description
Un groupe hors-norme. Si l’on pouvait résumer en quelques mots Radiohead, ce serait effectivement l’expérimentation, la créativité, et surtout ne jamais rien faire comme tout le monde. Et la recette a excellé, puisqu’on peut le dire sans aucune réserve : Radiohead est LE groupe britannique le plus important de la fin des années 90 et 2000. Qui a vécu son adolescence à cette période n’a pas pu passer à côté du phénomène Radiohead, ce groupe d’étudiants de la banlieue d’Oxford qui racontait tellement précisément le malaise dans nos sociétés post-industrielles, le désoeuvrement de sa jeunesse, et la façon de ne pas se sentir comme les autres. Radiohead est le groupe d’une époque, comme l’ont été Joy Division ou les Smiths pour les années 80. A la différence que le groupe oxfordien s’est renouvelé radicalement au cours des années 2000, ce qui leur a permis de durer.
D’abord cantonné à un genre un peu noisy à ses débuts avec Pablo Honey, Radiohead rentre véritablement dans la légende du rock avec OK Computer, en 1997. Un succès tel que le leader du groupe Thom Yorke mettra quelques années à s’en remettre après une dépression sévère suite à la tournée gigantesque de 120 dates de l’album.
In Rainbows nait après des années d’expérimentation pour le groupe, avec les albums Kid A, Amnesiac et surtout le très étrange Hail to The Thief en 2003. Thom Yorke, le leader du groupe, et ses acolytes décident avec In Rainbows de revenir à des morceaux plus simples, plus compréhensibles par leur public.
Ce 7ème opus marque un retour aux sources d’un groupe qui a toujours su conjuguer mélancolie vaporeuse, lyrics envoutés de Thom Yorke, a fluidité des riffs d’Ed O Brien, et arrangements oniriques de leur producteur de talent, considéré comme 6ème membre du groupe, Nigel Godrich. A l’époque de sa conception, le groupe est en fin de contrat avec leur maison de disques EMI. Des projets plus personnels des membres du groupe, notamment le projet solo de Thom Yorke, The Eraser. Mais en 2006, le groupe se retrouve en studio, enfin plutôt un manoir abandonné dans la campagne anglaise aux conditions spartiates : « on travaillait 5 à 6h par jour dans une atmosphère très étrange, ça ressemblait à un centre de désintoxication, c’était presque hanté » racontera Thom Yorke. In Rainbows nait dans ce contexte, et dès le premier morceau « 15 Step » on retrouve le groupe que l’on avait perdu avec les précédents albums et notamment Hail To The Thief. Deux premiers morceaux aux rythmes énervés pour retrouver l’énergie des débuts, mais toute la magie de Radiohead jaillit comme une explosion d’étoiles sur « Nude », 3ème
morceau de l’album. S’ensuit une succession de titres d’un velouté exceptionnel, avec la fragilité vocale tant maitrisée de Thom Yorke, constamment au bord d’un précipice imaginaire mais dont il connait parfaitement les limites. « Reckoner » atteint vocalement des sommets tandis qu’« All I need » semble être une déclaration d’amour aux fans : « you’re all I need » : de la musique, des gens pour l’écouter, et rien qui ne pollue ce canal.
In Rainbows restera l’album du renouveau pour certains, l’album de la surprise surtout, puisque sa sortie a marqué l’histoire de l’industrie musicale, ou plutôt lui a asséné un coup dont elle se souviendra : il sort à la surprise générale en octobre 2007, et pas chez les classiques disquaires… Sans contrat avec une major, libres de toute contrainte, Radiohead décide, comme Prince l’avait fait auparavant, de diffuser uniquement en téléchargement l’album. Chaque auditeur est libre de payer comme bon lui semble l’album. Un pied de nez radical aux maisons de disques, alors en pleine crise. L’esquisse d’un futur numérique qui s’est désormais généralisé. Visionnaire Radiohead. Malgré les années, les critiques, le groupe a toujours su se renouveler, et leur prochain album, prévu pour 2021 normalement, risque encore de nous surprendre.
Marie-Laure Sitbon