Description
On le sait, le Japon regorge de talentueux artistes qui érigent la musique comme un art de vivre, s’imprégnant à merveille des influences occidentales, avec parfois un perfectionnisme qui force l’admiration tout en gardant une spécificité nationale. Pourtant, même aujourd’hui et malgré internet et les réseaux, il est encore parfois difficile d’avoir accès à la richesse musicale du Pays du Soleil-Levant. Ce n’est pas le cas de l’œuvre du pianiste Koki Nakano qui a développé depuis longtemps des connections avec la France.
Il faut dire que dès l’âge de 3 ans, il débute le piano et fait de cet instrument le fil conducteur de ses études à Tokyo, dans de prestigieuses écoles de musique et à l’université des Arts de la ville. C’est pendant cette période qu’il va peaufiner son style, se professionnaliser et jouer des récitals à l’étranger en allant de Paris à New-York. Autant influencé par Radiohead que par Ryuichi Sakamato, il développe petit à petit son propre univers.
Sa carrière se lance réellement en 2016 lorsqu’il publie son premier album Lift avec le violoncelliste Vincent Ségal sur le label français No Format! de Laurent Bizot. Quatre ans plus tard, il lance sur le même label son premier LP en solo, Pre-Choregraphed, un album qui associe piano et musique électronique. Certains titres de celui-ci seront même remixés l’année d’après.
Au début de l’année 2022 il sort un nouvel album, Oceanic Feeling. Ce nom est inspiré par l’expression de l’écrivain et musicien français Romain Rolland qui, dans une lettre écrite à Sigmund Freud, décrit le sentiment océanique comme une“impression d’éternité, une sensation d’unité avec le monde qui nous entoure“. Selon Rolland, ce sentiment est la source de toute l’énergie qui imprègne les différents systèmes religieux. Et si la spiritualité est bien présente dans cet album, on y retrouve surtout la relation entre le corps et la musique, notamment au travers de la danse qui est un élément omniprésent des œuvres de Koki Nakano.
Cela transparaît dans ses clips, où les chorégraphies de danse contemporaine sont sublimées par la musique de l’artiste japonais.
Le premier extrait de l’album, « Glances », est chorégraphié et interprété par la danseuse américaine Tess Voelker et « Port de Bras » est accompagné d’un clip dans lequel danse Mourad Bouayad. Rien d’étonnant car ses compositions ne sont que mouvement et ondulation, quel que soit le tempo choisi et l’ambiance mise en avant. Ce disque lui a d’ailleurs été inspiré alors qu’il observait les danseurs évoluer sur sa musique durant une résidence artistique à la Cité des Arts à Paris.
Gardant une touche électronique, la musique d’Oceanic Feeling laisse la part belle aux mélodies qui évoluent à mi-chemin entre ambiant, musique contemporaine et néo-classique. Terriblement émotionnelle, elle illustre des thèmes profonds comme la naissance, le changement climatique ou les limites du corps humain.
On se laisse immerger dans son monde sonore et poétique, avec une impression de lâcher prise et d’évasion nécessaires pour apprécier au mieux ce genre de projet artistique.
Et si vous découvrez pour la première fois cet artiste, retenez bien son nom, il fourmille de mille projets qui risquent une fois de plus de nous surprendre dans les années à venir !
Arnaud Brailly