Description
Il y a des rencontres musicales qui semblent si évidentes qu’on se demande comment elles n’ont pas eu lieu plus tôt. Celle entre Piers Faccini, chanteur, guitariste et poète britannique, et Ballaké Sissoko, maître incontesté de la kora malienne, fait partie de ces dialogues intemporels qui dépassent les frontières et les genres.
D’un côté, Piers Faccini, artisan d’une folk nomade aux accents méditerranéens, baignée de blues et d’harmonies épurées. De l’autre, Ballaké Sissoko, héritier de la grande tradition mandingue, dont la kora tisse des mélodies d’une douceur hypnotique. Leur collaboration est un échange à la fois minimaliste et profond, où chaque note semble peser avec la grâce d’un mot bien choisi dans un poème.
Ensemble, ils offrent des morceaux d’une rare élégance, comme des conversations suspendues entre leurs cordes respectives. Faccini, avec son chant feutré, épouse les arabesques mélodiques de la kora de Sissoko, dans un dialogue presque chuchoté, loin des fusions tapageuses. Leur musique évoque les grands espaces, les terres rouges du Sahel, les rivages de la Méditerranée et ce fil invisible qui relie les traditions orales du monde entier.
La rencontre entre Faccini et Sissoko s’est faite il y a une vingtaine d’années, grâce à un cercle d’amis musiciens et à leur amour commun pour les dialogues musicaux entre cultures. Piers Faccini, passionné par les musiques du monde et notamment par les sonorités africaines, connaissait déjà le travail de Sissoko. C’est à Paris que leur première rencontre musicale a lieu dans un cadre intime, lors d’une session improvisée. Très vite, ils ont senti une connexion immédiate, comme s’ils avaient déjà joué ensemble depuis longtemps. À peine avaient-ils échangé quelques mots qu’ils s’étaient déjà plongés dans un dialogue entre la kora et la guitare, trouvant une harmonie naturelle sans effort. De cette première session est née l’envie de poursuivre l’aventure, d’abord par une collaboration sur un des premiers albums de Faccini, Tearing Sky en 2006 sur les morceaux « If I » ou « Talk to Her ».
Par la suite, avec des concerts en duo et des invitations croisées : Ballaké Sissoko propose à Piers Faccini de chanter « Kadidja », une chanson en Bambara, sur son album Djourou en 2021 et enfin par l’enregistrement d’Our Calling, un album qui capture cette magie du premier instant.
Avec Piers Faccini et Ballaké Sissoko, on ne parle pas simplement de fusion musicale, mais d’une véritable conversation entre deux sensibilités qui résonnent avec une harmonie naturelle et profonde : il y a des albums qui ne crient pas, qui ne cherchent pas à impressionner, mais qui s’infiltrent doucement dans l’âme, comme un murmure essentiel. Our Calling appartient à cette catégorie rare.
Ici, pas de démonstration de virtuosité, mais une conversation à la fois intime et universelle entre une guitare et une kora, entre deux traditions qui se croisent sans jamais s’envahir. On ressent l’évidence de leur dialogue : les notes se répondent, s’emmêlent, se détachent, comme si elles avaient toujours existé ensemble.
Le titre éponyme, « Our Calling » est une incantation douce, d’une humilité bouleversante, un appel à quelque chose de plus grand que nous, un retour à l’essence même de la musique.
Tout au long de l’album, on passe de plages instrumentales où la kora s’élève dans une grâce absolue (« The Thousand Lights ») à des morceaux où la voix de Faccini se fond dans un chant presque méditatif (« All This Time »). On y perçoit des échos du blues du désert, des balades méditerranéennes, des fragments de tradition mandingue, mais tout cela sans jamais paraître forcé.
Our Calling n’est pas un disque de fusion, mais un dialogue, une rencontre sincère qui repose sur l’écoute et le respect mutuel.
Un album qui respire, qui laisse de l’espace aux silences, aux échos, aux résonances. Il n’a pas besoin d’artifice pour toucher au cœur : il se suffit à lui-même, comme une évidence.
Marie-Laure Sitbon