Description
Ce n’est pas à vous que je vais l’apprendre… Acquérir un vinyle va au-delà de l’expérience auditive car c’est également une expérience sensorielle au sens large ! Combien de pochettes d’albums sont devenues aussi mythiques que le contenu sonore de leurs auteurs ?! Et qui n’a jamais acheté un disque en se fiant simplement à la cover du LP, au hasard des découvertes chez un disquaire ou en diggant en vide grenier ou autre brocante ? Si parfois le fond et la forme ne font pas bon ménage, il y a d’autre fois des fusions particulièrement réussies. Et ma première rencontre avec ce Shapes de Robohands a d’abord été visuelle.
Derrière cet album se cache le talent d’un graphiste et illustrateur serbe du nom de Marko Vuleta-Djukanov aka Floating Bstrd, dont les oeuvres se caractérisent par des couleurs vives et des formes et lignes tantôt tranchées, tantôt arrondies (certains spécialistes le surnomment “le nouveau Matisse !”). Que l’on aime ou pas, la cover de Shapes interpelle et ne peut laisser indifférent !
Mais parlons un peu musique quand même ! Parce que celle de Robohands vaut largement le détour. à l’origine de se projet : un musicien touche-à-tout, multi instrumentiste londonien nommé Andy Baxter. Sa carrière discographique commence en 2018 lorsqu’il sort un premier album remarqué dans le milieu jazz anglais.Green est un disque à mi-chemin entre cool jazz, ambiant et hip-hop sorti chez Village Live.
Fort de cette première reconnaissance par ses pairs, il sort rapidement un deuxième opus autoproduit l’année d’après, intitulé Dusk. Mais c’est ce troisième LP, Shapes, édité chez KingUnderground, qui va lui permettre de passer à la vitesse supérieure.
Conçu pendant la première période de confinement, Andy y joue de tous les instruments ou presque (quelques musiciens viennent en renfort ici ou là) : la batterie en premier lieu, son instrument de prédilection, mais également la basse, la guitare, les claviers, et même de la flûte tout juste appris au moment de la création de l’album. Largement inspiré par la library music des 70’s dont certains de ses mentors qu’il cite comme Piero Umilani, David Axelrod ou Brian Bennett, celui-ci n’en reste pas moins résolument moderne. Mais on ne peut nier les ambiances cinématographiques qui se dégagent de ses compositions.
Dès le morceau d’introduction « We’re From Nowhere » et sa basse pesante et funky on a l’impression d’être plongé dans le Harlem blaxploitation de la grande époque, et on ne peut s’empêcher d’y voir un clin d’oeil musical au « We live in Brooklyn, baby » de Roy Ayers. Mais on comprend rapidement que loin d’être un musicien nostalgique, Baxter écoute également ses contemporains comme Khruangbin ou BadBadNotGood. Cela se ressent fortement sur des morceaux comme « Leaves », « Odysea » ou « Ikigai » avec leurs guitares atmosphériques et les chœurs envoûtants de Fransesca Uberti, qui appellent instantanément au voyage et à l’évasion ! Mais parfois, les ambiances se tendent comme avec « Villains » plus angoissant, et ses envolées presque free jazz. Enfin, son jeu de batterie est également mis en avant sur le dernier titre « Stay free » et sa rythmique afrobeat qui n’est pas sans rappeler un certain Tony Allen et qui évoque la liberté créative comme fil conducteur de ses valeurs.
En neuf titres Shapes nous embarque dans ce néo jazz qui montre une fois de plus la vitalité de la scène anglaise en la matière depuis plusieurs années maintenant ! Au début de l’année 2022, Robohands signe son dernier album en date Violet sur le même label qui confirme tout le bien que l’on pensait de lui ! En permettant à plusieurs musiciens de se joindre à ce nouvel opus, Andy Baxter marque une volonté de collaborations plus abouties.
Sa carrière est à suivre de près et risque de révéler dans les années à venir quelques belles suprises. On vous aura prévenu.e.s !
Arnaud Brailly
