Description
Avant d’être la Queen of Soul que l’on connaît, la diva à la voix d’or, l’égérie engagée autant pour la cause des femmes que pour celle de la communauté afro-américaine, Aretha Franklin a eu un début de carrière bien moins remarqué auprès du grand public. Fille du célèbre pasteur Clarence LaVaughn Franklin, née à Memphis, Aretha est élevée dans une famille bourgeoise, religieuse sans être conservatrice, et grandit à Détroit où elle va tracer son propre chemin. Si elle et ses sœurs, Erma et Carolyn chantent bien évidemment du gospel à l’Eglise de leur père, à la maison on écoute autant la soul de Ray Charles et Sam Cooke que le jazz d’Oscar Peterson et Art Tatum.
Devenue mère très jeune (pour la 1ère fois à 14 ans !), elle continue malgré tout à s’engager auprès de son père et côtoie les studios d’enregistrement par l’entremise de celui-ci qui sort plusieurs disques de sermons distribués par le célèbre label de Chicago, Chess Records. Des professionnels du secteur repèrent sa voix d’exception et lui proposent d’enregistrer quelques titres à la fin des années 50, mais c’est sa rencontre avec Johnny Hammond qui va véritablement lancer son début de carrière. Producteur célèbre ayant découvert Billie Holiday, décédée quelques mois plus tôt, il signe Aretha sur le label Columbia en 1960. Son objectif est clair : en faire la nouvelle diva jazz qui va remplacer Holiday. Il s’y attelle en lui faisant enregistrer un premier album en 1961 en compagnie du Ray Bryant Combo nommé simplement Aretha . Il réussit plutôt bien son pari puisque dès cette première sortie, le magazine jazz et blues Downbeat la qualifie de “nouvelle star vocale féminine de l’année”. Ce premier succès critique convainc Hammond de continuer dans cette voie.
Son premier opus à peine sorti, elle fait une rencontre qui va changer sa vie personnelle et professionnelle : elle tombe amoureuse de Ted White qui a 11 ans de plus qu’elle. Il deviendra son mari ainsi que son manager jusqu’en 1968, année de leur divorce ! Ted joue un rôle important dans la volonté d’Aretha d’élargir son registre vocal et musical et c’est donc déjà la lente évolution observée sur ce deuxième album, Electrifying, pourtant enregistré avec un big band. Et si Johnny Hammond fait partie de l’aventure pour la production de cet album, il est accompagné d’Al Kasha, qui donnera une touche différente à certains morceaux. La tendance jazz est toujours d’actualité mais on intègre également quelques éléments souls voir pop ici ou là.
Le compositeur et arrangeur John Leslie McFarland, déjà présent sur son premier album, propose ici quatre compositions complètement inédites : « I Told You So » , tres influencée par Dinah Washington, « It’s So Heartbreakin’ », « Rough Lover » et « Just For You ». Le reste du tracklisting est constitué d’interprétations d’œuvres revendiquées par d’autres artistes, qui font largement partie du Great American Songbook, c’est-à-dire de standards du jazz et de la pop qui ont été écrits dans les années vingt, trente et quarante. La pratique est relativement courante à l’époque. Parmi celle-ci on retrouve « Made Me Love You », rendue populaire par Judy Garland (La face B de son célèbre tube « Over The Rainbow » !). Le premier morceau de l’album, « Rock-A-Bye Your Baby With A Dixie Melody » est également une reprise associée à Judith. Quant à « Ac-Cent-Tu-Ate The Positive », il fut un succès en 1945 avec la version de Bing Crosby qui est entrée au Billboard où elle a atteint la deuxième place.
Quoi qu’il en soit, on sent ici toute son expressivité et sa puissance vocale qui atteindront leur maturité quelques années plus tard. Le reste de l’histoire on la connaît, avec tout ce que ce grand nom de la musique populaire afro-américaine a pu apporter au monde de la musique et bien plus encore ! Aretha forever !
Arnaud Brailly