Description
Alors que l’on fête depuis cet été les 50 ans de la naissance du hip-hop, on peut certifier que Cypress Hill rentre aisément dans le top 10 des groupes les plus influents de ce mouvement, et pas seulement parce qu’il a vendu plus de 20 millions d’albums à travers le monde !
Et si le groupe a été aussi populaire, c’est peut-être aussi parce qu’il reflète l’histoire d’une population hispanique omniprésente aux USA, qui de façon légale ou illégale cherche à prendre sa part du rêve américain. L’histoire des membres de Cypress Hill en fait partie : quand en 1971, Sen Reyes (le futur Sen Dog) et son jeune frère Ulpiano Sergio Reyes (futur Mellow Man Ace, autre pointure du rap au début des 90’s), débarquent avec leurs parents de leur Cuba natal pour Los Angeles, rien ne prédit leur avenir. C’est la rencontre avec un certain Louis Freese (futur B-Real) à la Bell High School puis avec Lawrence Muggered aka Dj Muggs qui va être déterminante. Les quatre compères forment leur premier groupe sous le nom de DVX en 1988, mais rapidement Ulpiano décide de tenter sa chance en solo. Le trio restant décide alors de se nommer Cypress Hill et d’éditer leur première démo en 1989.
Repéré par le tout jeune label Ruffhouse Records, le groupe en devient la première signature essentielle et sort un album éponyme en 1991. Trouvant rapidement son public et porté par plusieurs singles efficaces (« Latin Lingo », « How I could just killed a man », « Hand on the pump »…) se vend à deux millions d’exemplaires et permet au groupe l’année suivante de faire le célèbre festival Lollapalooza ainsi que les premières parties des Beastie Boys.
Désormais bien installés dans le paysage musical, les trois compères explosent les compteurs en 1993 avec le très attendu 2e album Black Sunday qui se place automatiquement en 1ère place des charts US tout en amplifiant leur réputation à l’international grâce à des tubes comme « Insane in the brain », « When the ship goes down » ou « Hits from the bang ». Le combo devient même le fer de lance du collectif Soul Assassins qui réunit notamment House of Pain ou Funkdoobiest et est nominé la même année aux Grammy Awards.
Alors que le groupe intègre un 4e membre officiel, Eric Bobo, percussionniste des Beastie Boys, rencontré lors de leur tournée commune, l’album III : Temples of Boom, plus sombre mais connaissant le même succès que les précédents, vient clore en 1995 la trilogie d’une carrière démarrée à 100 à l’heure !
L’introspection nécessaire à tout groupe qui connaît le succès de manière fulgurante se fait sentir alors que la rigidité du management et des tournées amène Sen Dog à quitter le groupe peu après la sortie de Temples… pour former le groupe rock fusion SX10. L’année suivante, chacun se consacre à son projet solo: DJ,Muggs sort la compilation à succès Soul Assasins : Chapter 1 et B-Real participe activement au premier album de Psycho Realm tout en multipliant les collaborations prestigieuses avec la crème du hip-hop, comme sur le titre « Hit ‘em high » de la B.O Space Jam ou encore le fameux « East Coast Killer, West Coast Killer » extrait de l’album Dr. Dre presents the Aftermath.
C’est donc avec une certaine fébrilité que les aficionados de “Cypress” se demandaient s’il en était fini du groupe légendaire. Tout le monde fut vite rassuré avec la sortie en octobre 1998 du 4ème et dernier opus de la décennie, le bien nommé IV qui non seulement réunissait le staff au complet mais qui en plus renouait avec un classicisme fidèle à son esprit. Dès le premier titre « Looking through the yes of a pig » le ton est donné avec les flows de Sen et B-Real toujours aussi affûtés et les productions de Dj Muggs tantôt groove à souhait ou stridentes et inquiétantes. Quant à Eric Bobo, il ajoute sa pointe percussive comme sur l’un des singles phares de ce LP : « Mr Greenthumb » (Surnom de B-Real), titre minimaliste mais terriblement efficace. « Audio X » et « Dead Men tell no tales » et leurs boucles vous rentrent dans la tête immédiatement, tout comme « Tequila Sunrise » autre classique du disque avec ses guitares et trompettes mariachis qui rappellent la culture latine du groupe. Mais on sent que d’autres influences se font plus pressantes dans le processus créatif du combo. Déjà expérimentées par le passé avec leur présence sur le projet crossover hip-hop métal de la B.O de Judgement Night ou encore le side project de Sen Dog au sein de SX10 ou en featuring avec le groupe harcore metal Biohazard, l’avenir est au rock ! Si sur « Riot Stater » les guitares sont de sorties, bien que samplées, c’est surtout sur celui qui clôture l’album« Lightning Strikes », très rock fusion, que l’avenir du quatuor semble tout tracé. Et c’est en effet la direction qu’ils prendront lors de la décennie suivante avec Skull And Bones.
Quoi qu’il en soit, malgré des ventes moindres que les précédents (500 000 exemplaires aux USA quand même), IV marque la fin d’une ère, celle de la période d’or du hip-hop qui a vu naître tant d’artistes prestigieux reconnus encore aujourd’hui. Il est sûrement le dernier opus de leur discographie, totalement indispensable dans votre discothèque. Ça tombe bien, désormais vous l’avez !
Arnaud Brailly